Georges Mareschal, chirurgien du Roi

Par Ronald Virag

D’origine irlandaise par son père, un gentilhomme qui avait mis son épée au service de Louis XIII, Georges est chirurgien en chef de l’hôpital de la Charité – après avoir été reçu quatre ans plus tôt, à l’âge de trente ans, maître en chirurgie – lorsqu’il est appelé par le chirurgien Félix auprès du Roi-Soleil. Il est déjà connu pour l’ « opération de la taille », qui consiste à ouvrir la vessie pour en extraire prestement les calculs qui y sont retenus et provoquent douleurs, difficultés de miction et infections urinaires. Son adresse est telle, qu’un jour, il fit huit de ces interventions en un peu plus d’une demi-heure !

C’est en raison de cette réputation d’extrême habileté que Louis XIV fait appeler Mareschal pour son anthrax [Furoncle, Ndlr]. Une grande incision en croix fait jaillir du cou royal un flot de pus, et le roi guéri rapidement. Dès lors, ayant acquis la confiance du souverain et l’amitié de Félix, il noue à la cour de nombreuses relations comme Boileau et Racine ; il opère Bossuet, la princesse de Soubise et la marquise de Châtillon. Les consultations de princes étrangers sont fréquentes : le roi de Sardaigne, la reine d’Angleterre, mais aussi la Montespan et bien d’autres.

La confiance qu’a le roi en Mareschal s’accroit encore quand celui-ci, en 1698, réussit à guérir le maréchal de Villeroy d’une « descente d’organe » jusque dans ses nobles bourses.

Son blason figurera désormais dans l’Armorial de France. Et c’est tout naturellement qu’après la mort de Félix, il a été nommé premier chirurgien du royaume, sous les acclamations de toute la cour, le 14 juin 1703.

En un peu plus de vingt-cinq ans, l’apprenti chirurgien est devenu un personnage considérable. La même année, il s’est acquis la reconnaissance de Fagon, son alter ego premier médecin, en l’opérant avec succès de la « taille ».

D’après Saint-Simon, c’est Fagon, aidé de madame de Maintenon, qui favorisa sa nomination. Il est devenu le confident du roi, faisant partie, comme il se doit, de la vie quotidienne du souverain. Il le suivait partout, notamment à la chasse pour le cas où… C’est ainsi qu’en 1704, il réduisit – avec dit-on « une adresse sans égale » – l’épaule luxée du duc de Berry, après une chute de cheval.

Cette année, en 1715 quand la santé du roi déclina, il s’opposa encore à Fagon et à Madame de Maintenon qui ont sous-estimé l’état du roi. Fagon crut à une sciatique, Mareschal comprit très vite que le roi était perdu. Il ne peut rien contre l’horrible gangrène qui atteint la jambe gauche et progressait très vite.

Mareschal évoque la possibilité d’une amputation. Le roi était consentant : « Mareschal, n’avez-vous pas là des rasoirs ? Coupez ! Et ne craignez rien ! » Et puis « Me sauvera-t-on la vie ? » Et Mareschal de soupirer : « Il y a bien peu d’apparence. »

Par Ronald Virag, Chirurgien membre titulaire de l'Académie nationale de Chirurgie, extrait de l'article Les chirurgiens du roi, Magazine du château de Versailles, de l'Ancien Régime à nos jours (octobre, novembre, décembre 2014).